Yao Shih savait que Su avait bien dormi. Il avait été témoin de son sommeil pendant quelques heures avant de finalement s’endormir à son tour. Le général n’avait posé cette question que pour briser le silence, sachant très bien que Su attendait qu’il dise quelque chose.

— Je sais… Je t’ai observé dormir, pendant un moment.

Inutile ne spécifier pendant combien de temps, Wei Su n’avait pas besoin de le savoir. Cependant, une ombre de sourire apparu sur le visage de Yao Shih lorsque Su lui dit qu’il avait un sommeil très profond. Il baissa les yeux, regardant sa main posée sur le bord du lit.

— En fait, je dors très peu la nuit. Quand je dors… je peux le faire pendant des heures et rien ne peu me réveiller. D’habitude, j’arrive à dormir quand je suis chez moi… Dans un lieu où je me sens bien.

Ses propres paroles le surprirent un peu. Il avouait qu’il avait été bien? Oui, qui ne l’aurait pas été? Après tout, personne n’avait été forcé à quoique se soit et les deux avaient ressenti beaucoup de plaisir. La main qui se posa sur la sienne le fit tressaillir légèrement. Il regarda la main intruse, puis son propriétaire. Ce contact était étrange, mais pas désagréable. Il était drôlement intime, presque plus que la nuit dernière qui n’était qu’un souvenir. Là, c’était tangible et Yao Shih était lucide malgré les bribes de sommeils qui s’attardaient encore dans son esprit. Le voulant pas blessé Su, il resta ainsi, le regard posé sur cette main qui n’était pas la sienne. Elle était agréablement chaude, mais pas aussi douce qu’il l’aurait pensé. L’entrainement à l’épée avait rendu les mains légèrement calleuses. Emporté par sa curiosité, Yao Shih prit la main de Wei Su et la retourna pour exposer la paume. Du bout des doigts, il la caressa, prenant conscience qu’il n’était pas simplement un homme de livre, il était un guerrier, comme lui.

— Ta main… Elle me dit que tu es un guerrier.

Yao Shih le regarda dans les yeux avant de lâcher la main. Il se leva et fit un pas dans la pièce. Il était encore complètement nu et autant dire qu’il offrait un joli spectacle ainsi dans son plus simple appareille. Il regarda la pièce qui était en meilleur état. Les débris des meubles brisés avaient été empilés dans un coin et ceux qui avaient été simplement renversés étaient à nouveau en place. Ses propres choses avaient été soigneusement pliées par Su lui-même qui s’était métamorphosé en vraie fée du logis pour l’occasion. Yao Shih s’habilla et une fois fait, il fouilla dans son sac à la recherche d’un objet bien précis. Il n’avait pas vu son reflet, mais il était certain d’avoir un nid de corbeaux plutôt que des cheveux sur la tête. Au bout d’un moment, le général sortit un peigne taillé dans une essence de bois précieuse. Il avait appartenu à sa mère et même si l’objet était féminin, Yao Shih ne voyait aucun problème à l’utiliser. Il se tourna vers Wei Su et déclara sur un ton un peu timide.

— Tu veux bien… me peigner les cheveux?

C’était le genre de chose que le général aimait. Il adorait qu’on lui joue dans les cheveux. C’était un vague souvenir de sa mère. Bien qu’il ait été très jeune lorsqu’elle est morte, il n’avait pas de mal à imaginer les douces caresses sur sa tête d’enfant. Yao Shih avait peut-être un peu trop d’imagination.

Il revint s’assoir sur le lit et tendit le peigne à Wei Su. Le bois avait été patiné par l’usage et il était très doux au touché.